mastodon.xyz is one of the many independent Mastodon servers you can use to participate in the fediverse.
A Mastodon instance, open to everyone, but mainly English and French speaking.

Administered by:

Server stats:

824
active users

#stefaniabarca

0 posts0 participants0 posts today

La catastrophe industrielle de Manfredonia (Pouilles, Italie. 1976)

Un extrait du livre de Stefania Barca, Workers of the Earth. Labour, Ecology and Reproduction in the Age of Climate Change, Pluto Press 2024.

outsiderland.com/danahilliot/s

Un des points aveugles de la propagande en faveur l’éthique du travail (ou la « valeur travail »), c’est la catastrophe industrielle. toutes les régions du monde dans lesquelles se déploient les usines et les infrastructures du capitalisme industriel ont connu leurs catastrophes. Les plus spectaculaires scandent l’histoire du capitalisme. Pour ne prendre que des épisodes récents, Seveso, Bhopal, Tchernobyl, hantent (ou devraient hanter) les mémoires des habitant‧e‧s de cette planète. La vérité, c’est qu’on les oublie vite : quelle trace a laissé dans la mémoire des européens l’explosion d’un stock de 2750 tonnes de nitrate d’ammonium dans le port de Beyrouth en août 2020 ? Qui se souvient des 1127 morts et des milliers de blessés lors de l’effondrement de l’atelier de confection Rana Plaza à Dacca (Bangladesh) en 2014 ?

Pire encore que l’oubli, il y a l’ignorance pure et simple. Parce que la catastrophe industrielle n’est pas toujours spectaculaire. Les effets les plus courants de la production industrielle s’inscrivent dans ce qu’on appelle en anglais les « slow disaster » : pensez à la différence entre un tsunami dévastateur, et la montée des eaux telle qu’elle se manifeste à l’ère du changement climatique. Rob Nixon, dans son ouvrage désormais classique, The Slow violence and the environmentalism of the poor, 2011, s’inscrivant dans une longue tradition de recherches, avait rappelé combien ces effets toxiques de l’activité industrielle touchent d’abord et avant tout les classes les plus défavorisées, et pas seulement dans les territoires d’exploitation néocoloniaux. Cette tradition critique remonte déjà au XIXè siècle, on en lit des échos par exemple chez Marx, mais elle se développe surtout depuis les années 60, dans tous les milieux critiques et militants, écologistes, féministes, indigénistes etc. On peut les rassembler par commodité dans la catégorie de la « justice environnementale » – en gardant à l’esprit le caractère social et politique de l’ « environnemtal justice » (qui se distingue de ce point de vue des perspectives « environnementalistes » conservatrices classiques – défendre une nature « pure » fantasmée en dépit des êtres humains qui l’habitent et la transforment).

Les impacts les plus mortifères et destructeurs de l’activité industrielle (et plus largement, de toute la chaîne de production capitaliste, depuis l’extraction jusqu’à la livraison du produit fini, en passant par la fabrication, la transformation, les infrastructures militarisées des transports, etc.) sont sournois, bien qu’omniprésents, et parce qu’ils se déploient progressivement, lentement, et ne se manifestent souvent qu’après des années, voire des décennies, notamment dans le cas des cancers et autres pathologies touchant notamment les personnes les plus fragiles, à commencer par les nouveau-nés, ces effets sont aisément invisibilisés par les capitalistes. Ces empoisonnements systémiques sont d’autant plus aisément occultés par les responsables que les faits épidémiologiques ou environnementaux, pour être établis objectivement, requièrent le concours des scientifiques, c’est-à-dire d’une expertise dont les ouvrières du textile au Bangladesh ou les parents des enfants malformés à la naissance dans les zones industrielles ne disposent pas. La reconnaissance des effets sur la santé et l’environnement de l’activité de production repose inévitablement sur l’alliance des victimes et des scientifiques, ce qui pose d’évidents problèmes : car, du côté des responsables, on se fait fort de financer des expertises qui tendront à rassurer, c’est-à-dire le plus souvent à minimiser, voire à occulter, ces effets – et, dans le meilleur des cas, le débat se déplace entre deux expertises, deux communautés scientifiques, l’une, grassement payée, au service du capital, et l’autre, du côté des militants, souvent composée d’étudiants ou de chercheurs et chercheuses issues de l’université, beaucoup moins bien rémunérés, voire pas rémunérés du tout.

J’en viens maintenant au récit que Stefania Barca fait d’une catastrophe dont on ne trouve que très peu de traces dans les médias ou sur internet. Celle de l’usine de Manfredonia, dans les Pouilles italiennes en 1976, à la fois éclipsée par la catastrophe de Seveso, qui s’était produite deux mois auparavant, et aisément occultée parce qu’elle se déroulait dans une ville du sud de l’Italie, et non pas dans le Nord – une des conséquences de cette situation géographique, c’est notamment, comme on le lira, l’absence de « prise de conscience » politique, syndicale et des milieux médicaux. La lutte, car lutte il y eut, difficile et mal récompensée, vint d’abord des populations locales, des femmes notamment.

Lire la suite sur mon blog !

Et qui donc a découvert aujourd'hui que Stefania Barca avait publié l'an passé sur le travail un gros bouquin dans une perspective écoféministe ? 😍 😍

Workers of the Earth
Labour, Ecology and Reproduction in the Age of Climate Change

plutobooks.com/9780745343877/w

Je l'ai commencé à la sieste (et donc je n'ai pas dormi 😅 ) et c'est passionnant.

(forcément chez PlutoBooks ! J'avais adoré son petit volume, une excellente synthèse "intersectionnelle" : Forces of Reproduction: Notes for a Counter-Hegemonic Anthropocene, paru il y a quelques années. Elle se situe dans la tradition des autonomismes marxistes italiens, qu'elle croise brillamment avec les perspectives éco-fénimistes, décoloniale/indigéniste, les théories de la décroissance - sans oublier son travail de terrain notamment dans les zones de sacrifice italiennes)

Continued thread

C'est un peu le pendant "socialiste" de cette autre synthèse décapante dont j'ai parlé à plusieurs reprises de Stefania Barca - en ce qu'elle reprenne toutes deux ce thème central de la critique féministe du capitalisme : prendre en compte toutes celles et ceux, y compris les non-humains qui contribuent à la sphère de la reproduction – et qui sont exploités (sous la forme de travail non payé) par le capitaliste - qui sont impliqués dans ce travail humain et plus qu’humain qui “reproduit l’humanité en prenant soin de l’environnement biophysique qui rend la vie elle-même possible”.

outsiderland.com/danahilliot/r

Que ce soit chez Nancy Fraser ou chez Stefania Barca (et beaucoup beaucoup d'autres), il ne s'agit pas de nier la dimension économique du capitalisme (ou la lutte des classes, avec le projet d'élargir l'idée et la composition des classes) - mais de remettre au centre des priorités ce qui est relégué (et souvent occulté) par les capitalistes eux-mêmes. Comme l'écrivait Sarah Ahmed (dans le passionnant texte qui date d'il y a 20 ans : The Cultural Politics of Emotion, Edinburgh Univ. Press, 2004 - seconde edition 2014) :

"What is relegated to the margins is often, as we know from deconstruction, right at the centre of thought itself."

outsiderland.comRepenser le matérialisme historique en termes éco-féministes (Stefania Barca)Ci après large extrait de la conclusion du livre de Stefania Barca, Forces of reproduction, Notes for a Counter-Hegemonic Anthropocene, publié dans l’excellente collection « Elements in environnem…
Replied in thread

@maxsol

Oui j'ai vu ça !

contretemps.eu/author/stefania

J'en ai dit quelques mots ici sur Mastodon, et sur mon blog :

climatejustice.social/tags/Ste

outsiderland.com/danahilliot/r

Les copines féministes la connaissent sans doute - son livre dans la collection Éléments, chez Cambridge UP, fournit vraiment une excellente boussole en ces temps déboussolants.

CONTRETEMPSStefania Barca, auteur/autrice sur CONTRETEMPS
Continued thread

REPENSER LE MATÉRIALISME HISTORIQUE EN TERMES ÉCO-FÉMINISTES (3/3)

"Le matérialisme historique – la théorie de la lutte des classes comme moteur fondamental du changement – serait élargi au-delà du domaine exclusif du conflit entre capitalistes et salariés qui résistent à l’exploitation et à l’épuisement des corps, pour inclure tous les sujets de la protection de la terre qui résistent à l’extraction de la valeur et à la dégradation des systèmes terrestres. Une telle vision renouvelée du matérialisme historique permettrait de penser en termes d’alliances les rapports entre les travailleurs industriels et méta-industriels sur la base d’un intérêt matériel commun à maintenir le monde en vie en transformant les relations de re/production. Ces alliances doivent impliquer les sciences et les technologies qui sont appropriées ou déjà mobilisées dans les projets de contre-maîtrise de la protection de la terre. En d’autres termes, défaire l’Anthropocène et construire de nouvelles relations écologiques nécessite une politisation radicale de la science et de la technologie, c’est-à-dire leur mobilisation en tant qu’outils de contre-maîtrise. Cette approche diffère considérablement des appels éco-modernistes à embrasser pleinement les forces de production, dans le sens d’une prise de responsabilité collective pour les conséquences involontaires de la modernité industrielle, et à s’engager dans un niveau encore plus élevé de maîtrise des systèmes terrestres. Une telle approche, selon moi, représente une version industrielle/masculiniste de la prise en charge. Comme l’histoire de Welcome to the Anthropocene (le petit clip vidéo qui ouvrait le sommet de Rio 1992), elle reflète le point de vue privilégié de ceux qui ont fait de l’Anthropocene leur foyer, plutôt que de ceux qui l’ont subi et y ont résisté ; elle postule un sujet maître qui prend soin des autres inférieurs qui dépendent de lui – plutôt que l’inverse. De plus, il considère le modèle de la modernité comme universel, sans tenir compte des oppressions de classe, de genre, d’espèce et de race qu’il a engendrées. Tout cela découle d’une compréhension hégémonique et post-politique des forces de production en tant qu’outils du maître, et de l’ignorance ou du silence des subjectivités non-maîtresses qui ont également fait la modernité, et de leurs pratiques alternatives de protection de la terre.

Ma vision d’un monde post-Anthropocène, au contraire, commence par reconnaître que la vie dans l’Anthropocène est le résultat d’une histoire douloureuse de contre-maîtrise. Cela implique de reconnaître les possibilités réellement respectueuses de la terre qui peuvent être ouvertes en libérant les forces de re/production. La contre-plantation (parcelle d’esclave), les projets de conservation autochtones, l’approvisionnement de subsistance, l’autonomie reproductive des femmes, les occupations d’usines, les luttes environnementales des syndicats, les projets de jardinage et de reforestation communautaires, l’agroécologie, la permaculture et les réserves d’extraction représentent, selon moi, des moyens non-maîtrisés de contrer la rupture métabolique, visant à re-commoniser les moyens de re/production. Il ne s’agit pas d’une liste exhaustive, bien sûr ; de nombreux autres exemples pourraient être ajoutés, d’autres histoires exhumées de l’oubli du récit du maître. Rassemblés, ces sujets alternatifs de l’Anthropocène et leurs pratiques pourraient transformer les soins de la terre en une nouvelle révolution écologique véritablement émancipatrice."

#Ecofeminism
#StefaniaBarca

Continued thread

REPENSER LE MATÉRIALISME HISTORIQUE EN TERMES ÉCO-FÉMINISTES (2/3)

"La thèse avancée dans cet Élément est que pour défaire l’Anthropocène et faire de la place à des modes d’habitation de la terre contre-hégémoniques, il faut voir et valoriser les forces de reproduction. J’ai soutenu que cela n’impliquait pas une focalisation exclusive sur l’agentivité des femmes en tant que gardiennes de la terre, mais plutôt un rejet radical des relations de genre/coloniales/espèces/classes ancrées dans le modèle-maître (master model) de la modernité. Bien que l’écoféminisme soit né et demeure un mouvement essentiellement féminin, il n’est pas nécessaire d’être une femme pour partager sa vision et sa pratique (toutes les femmes n’y adhèrent pas non plus). La multitude de collectifs qui luttent pour défendre les principes du commoning, de l’éco-efficacité et de la justice environnementale globale dans différentes parties du monde ne peuvent pas être identifiés comme des mouvements de femmes. Même si la recherche empirique a montré que les femmes sont principalement actives dans ces collectifs axés sur la reproduction/justice – plutôt que dans des initiatives éco-modernistes, gouvernementales ou de croissance verte – il serait erroné de conclure que c’est dans leur nature de le faire. De plus, cela légitimerait évidemment la division sexuelle du travail qui est au cœur même de la crise écologique. Dans l’écologie politique féministe, il ne s’agit pas de romancer l’engagement des femmes dans l’activisme écologique et pacifique de base, mais de montrer comment cet engagement est le résultat de la division sexuelle du travail, de l’échelle locale à l’échelle mondiale. L’objectif est d’abolir l’hétéropatriarcat, et donc de libérer les gens des rôles genrés qu’ils endossent – en particulier ceux de l’homme, faiseur d’argent, qui détruit la nature, et de la femme, créatrice de vie, qui sauve la nature. Les écoféministes considèrent qu’il s’agit d’une étape préliminaire (et non d’une conséquence) à la lutte contre la division raciale/coloniale du travail, les inégalités de classe et le spécisme – les autres moyens par lesquels le capital dévalorise le travail, en plaçant le profit au-dessus de la vie. La colonialité, le genre, la classe et l’espèce sont tous importants pour l’Anthropocène : les luttes pour défaire chacun d’entre eux sont croisées et ne peuvent être séparées. Ensemble, elles forment l’essence de ce que le mouvement pour la justice climatique appelle le « changement de système ».

Cette vision politique nécessite de repenser le matérialisme historique en termes éco-féministes. Le processus de prolétarisation mondiale qui a accompagné l’Anthropocène a généré des contradictions non seulement écologiques, mais aussi sociales et politiques ; il a servi à maintenir la division entre le travail salarié, les travailleurs non salariés et la nature non humaine. En se concentrant sur le travail salarié industriel, la théorie marxiste et les organisations syndicales ont souvent manqué cette contradiction stratégique, maintenant une séparation problématique entre les luttes syndicales, féministes, indigènes, paysannes et environnementales – ou entre les intérêts et les luttes des travailleurs industriels et méta-industriels. Une perspective écoféministe suggère que le cœur du problème pour une écologie politique vraiment radicale consiste à élargir la sphère sémantique du travail vers l’inclusion du travail industriel et méta-industriel dans leur relation historique dialectique. Cela permettrait d’élargir le champ d’application de l’environnementalisme du travail, en renforçant ses potentialités en tant qu’agent de la révolution écologique.

=>>

#Ecofeminism
#StefaniaBarca

REPENSER LE MATÉRIALISME HISTORIQUE EN TERMES ÉCO-FÉMINISTES (1/3)

Ci-après un large extrait de la conclusion du livre de Stefania Barca, Forces of reproduction, Notes for a Counter-Hegemonic Anthropocene, publié dans l’excellente collection « Elements in environnemental Humanities » (Cambridge University Press), en 2020. Je l’ai découverte grâce au livre de Kohei Saito, qui la cite abondamment.

Je recommande vivement ce texte à tous mes ami.e.s militant.e.s et chercheurs/chercheuses qui travaillent sous le régime de ce qu’on appellera ici le capitalocène – plutôt qu’anthropocène, c’est-à-dire qui envisagent les injustices environnementales sous l’angle de l’exploitation capitaliste générale à l’heure du néolibéralisme triomphant. Et ce pour au moins trois raisons :

1. Stefania Barca produit une synthèse actualisée des problématiques soulevées par le mouvement éco-féministe, notamment autour de la question de la “reproduction” et du soin de la terre (earth care), élargissant la perspective initiale au-delà de la question du statut des femmes à proprement parler (tout en conservant les outils analytiques du féminisme historique)

2. Elle distingue de manière radicale ce qu’elle appelle l’éco-modernisme (qu’on nomme aussi du nom d’éco-capitalisme), manière masculiniste et patriarcale de traiter les effets de la production industrielle sur l’environnement sur le mode de la crise (et non pas comme une catastrophe, qui obligerait à attaquer le système lui-même), de ce qu’elle désigne comme éco-féminisme, ensemble de luttes et d’analyses qui au contraire proposent non pas seulement des alternatives, mais des subversions et des inversions de l’idéologie hégémonique. Au fond, l’objectif de l’éco-féminisme est de changer le système et pas le climat (contre le discours hégémonique qui prétend “changer le climat” grâce au progrès technologique, au capitalisme vert, aux marchés carbone et à l’objectivation continue de la nature (considéré comme le nouvel ennemi du Capital).

3. Elle prend position de manière assez convaincante sur une question brûlante dans les milieux marxistes : il faut (selon elle, et selon de nombreux marxistes contemporains) non pas dépasser, mais élargir la théorie de la lutte des classes, en y incluant toutes celles et ceux, y compris les non-humains qui contribuent à la sphère de la reproduction – et qui sont exploités (sous la forme de travail non payé) par le capitaliste.Toutes celles et ceux qui sont impliqués dans ce travail humain et plus qu’humain qui “reproduit l’humanité en prenant soin de l’environnement biophysique qui rend la vie elle-même possible”.

outsiderland.com/danahilliot/r

=>>

Replied in thread

@lautfille

Certes. Mais comme tu le suggères à la fin de ton message, la question pourrait se reformuler ainsi : d'où pourrait venir cette nouvelle lutte des classes (suffisamment puissante pour avoir un effet durable) ? De facto, là où ça envoie le plus actuellement c'est en Asie (à commencer par la Chine) dans tout le subcontinent indien (et là, forcément l'exemple spectaculaire du Bangladesh vient à l'esprit), et je pense beaucoup aux luttes indigènes en Amérique latine, ou dans les zones d'extraction un peu partout (en Afrique par exemple). Les syndicats aux États-Unis ont repris du poil de la bête aussi dans certains secteurs.
Le problème, c'est comment ces différentes luttes pourraient "converger" au niveau international. Est-ce que les gauches en Europe se sentent concernées par ces luttes, qui touchent généralement à des bouts de chaîne de l'approvisionnement, l'extraction initiale, la production, les infrastructures, et tout cela devient une menace pour la circulation des flux de marchandises sur le marché global (d'où la militarisation croissante de ces zones vitales pour le capitalisme, et les répressions féroces des contestataires). Comment ici, en Europe, pourrions-nous articuler nos propres contestations avec ce qui se joue ailleurs, et qui pourtant nous concerne directement (parce qu'il s'agit des marchandises que nous consommons, et donc, tous ces lieux de lutte sont aussi les lieux où nous avons externalisé l'exploitation, la destruction environnementale, la militarisation etc..)

Je ne lis absolument rien dans les programmes de gauche en Europe à ce sujet. Les terrains où doit se jouer la lutte contre l'exploitation capitaliste (des humains et des non-humains) sont situés loin des yeux loin du cœur, certes. Mais à quoi bon par exemple '"augmenter le pouvoir d'achat" du prolétariat ou des classes moyennes en Europe, si c'est pour continuer à consommer plus (et refiler soit dit en passant ce revenu supplémentaire aux capitalistes sous forme "d'achats" supplémentaires), et donc remettre une pièce dans la machine à exploiter le précariat mondial (sans parler des environnements etc..) ?

Dans les mouvances eco-marxistes, et bien d'autres, cette question se pose désormais avec force. Il ne faudrait pas que l'éventuel bénéfice de luttes locales en Europe se gagne au détriment des "autres" (que nous continuerions à exploiter). La lutte des classes, oui, mais à condition de réformer notre conception de ce qu'est la classe des exploités (il y a même des écomarxiste qui font entrer les animaux, les forêts, la terre, dans la "classe exploitée").

Si tu as l'occasion, je te conseille de jeter un œil sur le livre récent de la chercheuse eéco-féministe italienne Stefania Barca, Forces of reproduction, Notes for a Counter-Hegemonic Anthropocene, Cambridge 2020.

(ça se lit très bien, et si on a quelques notions de Marx en tête, ça aide pas mal)

cambridge.org/core/elements/ab

Ci-joint quelques copies d'écran du bouquin.